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L'observateur Flinois
19 février 2024

Esprit boutiquier

Fin janvier dans le billet (Le monde est devenu fou) je m’inquiétais du chantage des Représentants Républicains américains qui bloquent le vote d’une importante aide financière à l’Ukraine en guerre, faisant un chantage éhonté pour extorquer des fonds au gouvernement afin de contrer une  « subversion migratoire » via le Mexique.

En fait, la situation est encore plus grave que ça. L’apprenti dictateur Trump (c’est lui qui l’a déclaré) qui ambitionne de redevenir président des États-Unis s’est épanché lors d’un meeting électoral. En substance, samedi 10 janvier 2024, dans le cadre d'un meeting en Caroline du Sud et pour galvaniser ses électeurs, il aurait proposé de laisser l’autocrate Poutine envahir à sa guise tel ou tel de ses voisins européens, membre de l’OTAN mais n’ayant pas selon Trump « payé ses factures », sans lever le petit doigt.

Cette déclaration (fanfaronnade ?) contredit l’article 5 de la Charte de l’OTAN qui dit que si un pays  adhérent est victime d'une attaque armée, chaque membre de l'Alliance considérera cet acte de violence comme une attaque armée dirigée contre l'ensemble des membres et prendra les mesures qu'il juge nécessaires pour venir en aide au pays attaqué. 

On peut essayer de relativiser en se rappelant que la Caroline du Sud est un des états les plus religieux et conservateurs des USA, qu’il est gouverné depuis les années 70 par les Républicains et que son économie est essentiellement agricole. Ces électeurs de Trump sont certainement plus préoccupés par les cours de la volaille et le contenu du dernier sermon du pasteur que par la situation en Europe : la sortie de leur leader visait à les caresser dans le sens du poil tout en « faisant excessivement mousser »  son auteur.

Qu’un candidat dirigeant à un pays de l’OTAN ait seulement une telle pensée est pourtant rédhibitoire : il faut considérer que l’hypothèse devient plausible.

En bon boutiquier qu’il est Trump ne raisonne qu’en transactions commerciales. Par « payer ses factures » il entend « consacrer 2% de son Produit Intérieur Brut (PIB) pour la Défense. » Son cynisme est incommensurable. Dans ses réflexions simplistes il est sans doute persuadé que si Poutine attaque la Finlande, la Pologne ou un des Pays Baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie), les industriels américains pourront marchander des augmentations de prix sur les fournitures militaires conditionnant l’intervention des Américains. La partie américaine de l’’OTAN deviendrait une agence de mercenaires comme la russe Wagner.

Si les USA sont les premiers contributeurs au budget de l’OTAN, c’est d’abord parce qu’ils sont les plus gros et qu’en matière d’entente, c’est généralement celui qui amène la plus grosse part qui dirige. En contrepartie, les états membres de l’OTAN achètent une part substantielle de leurs armes et équipements militaires aux industries américaines ce qui crée des emplois américains et génère des dividendes aux actionnaires américains.

Il faut intégrer les propos de Trump comme constituant une vraie menace et préparer des plans pour la contrer. Cela passe par réduire la dépendance aveugle au parapluie américain. Que les pays qui arbitrent leurs efforts budgétaires en faisant l’impasse sur la Défense se motivent et contribuent à hauteur de leurs moyens réels à leur défense. Cela passe sans doute aussi par une révolution culturelle : construire une vraie souveraineté européenne et bâtir la politique de défense européenne qui en découle : ne pas être dépendants des contingences intérieures américaines mais être capable  de se faire respecter en toute autonomie. La structuration d’une vraie industrie de défense européenne avec des produits unifiés et interopérables, et non pas la fabrication de produits nationaux concurrents et incompatibles, est également indispensable.

Dans ce domaine, l’esprit boutiquier des industriels européens, ainsi que les atermoiements successifs des donneurs d’ordres politiques sont également un puissant frein. Selon un bilan de la cour des comptes, les dernières coopérations en matière de production de vecteurs militaires communs sont très médiocres : quatre flops économiques (avion de transport militaire A400M, hélicoptère Tigre, hélicoptère NH90, frégates FREMM) ; un échec (porte-avions franco-britannique) ; un succès (missiles anti-aériens Aster). Il y a du boulot !

L’esprit boutiquier se retrouve également dans la grève corporatiste entamée par les contrôleurs de la SNCF en plein week-end de chassé-croisé des vacances d’hiver. Il s’agit d’une démarche « spontanée » des salariés réunis dans un collectif « réseaux sociaux », hors syndicats, ceux-ci ayant seulement aimablement accepté de déposer les préavis de grève qu’ils sont seuls habilités légalement à manipuler. Leur complaisance n’est pas, bien entendu, sans arrière-pensées pour les prochaines élections professionnelles.

Que le métier de contrôleur soit pénible est sans doute réel, mais pourquoi prendre en otages les voyageurs qui n’en peuvent mais ? La direction de la SNCF fait valoir que les rémunérations de ses salariés ont augmenté de 12 % en 2 ans.

Les contrôleurs actuels (qui sont toujours « au statut » donc avec une garantie de l’emploi quasiment inoxydable sauf faute lourde) veulent une augmentation substantielle de leurs retraites. Ils feignent d’oublier que les contribuables abondent déjà de près de 60% le montant des pensions des cheminots (dont eux), car leurs cotisations sont notoirement insuffisantes. Ils nous empêchent de nous déplacer et il faudrait qu’on rallonge ce qu’on leur donne déjà ?

La délicieuse Mathilde Panot, cheffe de file des députés Insoumis à l’Assemblée, s’est épanchée dans la presse et trouverait normal, si le rapport de force était en leur faveur, que les salariés qui le peuvent sabotent les jeux olympiques en juillet…

Autre illustration de l’esprit boutiquier. Le malaise des agriculteurs est réel : revenus faibles pour beaucoup, tracasseries administratives abusives, etc. Pour acheter la paix sociale, le gouvernement a accepté la revendication des gros industriels agricoles (majoritaires à la FNSEA) : surseoir à la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires. Ceux-ci facilitent la vie des exploitants en permettant de tuer tout ce qui est néfaste aux plantations et donc aux rendements productifs de gros bénéfices.

Les produits phytosanitaires englobent les insecticides, les fongicides et les herbicides, tous ces produits chimiques dont on retrouve des traces dans nos aliments, qui bousillent les insectes (dont les pollinisateurs indispensables) et font crever de faim les animaux qui s’en nourrissent (oiseaux notamment)

Pour protéger les revenus actuels des gros exploitants, on hypothèque encore plus la biodiversité future et on augmente nos risques d’allergies et autre baisse de fécondité ou augmentation de maladies chroniques.

Dans le règne animal, en fonction des conditions de vie, les taux de reproduction fluctuent : si le contexte est mauvais, les animaux se reproduisent moins. Nous assistons à une baisse de fertilité mondiale. Relation instinctive de cause à effet ? Il serait peut-être temps de laisser les corporatismes et manières boutiquières à courte vue derrière nous et de consacrer notre énergie collective au sauvetage de notre biotope pour que les générations futures aient un avenir.

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