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L'observateur Flinois
9 novembre 2020

Risque de contagion

Dans le billet « INQUIÉTUDE ! » du 13 octobre, je faisais part de mon alarme face aux signes de désinformation et de délitement de notre contrat social en constatant que «  De plus en plus d'individus n'acceptent plus les règles de notre contrat social pendant que parallèlement l'individualisme corporatiste s'exacerbe »

Le triste spectacle du feuilleton annoncé pour la fin de l’élection du président des États-Unis doit aussi nous interpeler.

Bien sûr, les USA sont une fédération d’États et leur système électoral peut nous paraître peu compréhensible. Pour faire simple, chacun des États ayant librement accepté d’adhérer à cette fédération conserve son système électoral (avec ses règles) et contribue à élire le président de la fédération en désignant, selon son propre code électoral local, des Grands Électeurs chargés de la deuxième étape. Ceci explique la difficulté de la publication des résultats.

Certains États autorisent le vote anticipé de plusieurs semaines avant la date fixée pour le  scrutin (« election day ») commune pour l’ensemble du territoire des USA ; d’autres acceptent les bulletins arrivés plusieurs jours après cette date, à condition qu’ils aient été postés au plus tard le jour du scrutin, le cachet de la poste faisant foi. Quand on ajoute le fait que, par souci pratique et selon leurs Constitutions particulières, les États profitent généralement de cet « election day » pour organiser en même temps des élections locales (totalité des Représentants, une partie renouvelable des sénateurs,  une partie renouvelable des gouverneurs d’État, des shérifs, juges civils, procureurs locaux… ainsi que  des référendum divers.) on comprend mieux pourquoi le dépouillement peut se révéler aussi long dans certains États, d’autant plus que COVID-19 oblige, des États (surtout ceux gouvernés par les Démocrates, plus conscients des risques sanitaires) ont encouragé le vote anticipé ou par correspondance afin de limiter la propagation du virus.

Pour mémoire, nous pratiquons également ce type de scrutin indirect puisque nos sénateurs sont élus par un collège de grands électeurs constitué majoritairement de conseillers municipaux représentant 95% des quelque 162 000 électeurs des sénateurs. Qui pourtant, aux dernières municipales de mars 2020, a intégré dans son choix pour le prochain maire, la couleur politique probable des candidats sénateurs pour lequel les conseillers municipaux élus seraient appelés à voter durant leur mandat de 6 ans ? L'élection de notre collège de Grands électeurs se fait dans l'indifférence et l'ignorance totale. Les sénateurs sont pourtant la cible d'interrogations populaires quant à leur nombre, leur train de vie et leur utilité réelle.

Le fait marquant n’est pas cette complexité ni cette lenteur car, sauf preuve du contraire, pas encore apportée par le camp Trump, le processus démocratique fonctionne globalement bien, aux petites scories habituelles inhérentes à l’organisation d’un scrutin. (En France aussi il y a toujours quelques recours parfois suivis de quelques invalidations après des élections)

Non le scandale et le danger sont ailleurs. Trump qui était en tête à l’issue du dépouillement des bulletins déposés en personne dans les urnes de certains États versatiles votant parfois Républicain ou parfois Démocrate (les swing states) souhaite que l’on ne compte pas les bulletins déposés par anticipation dans des urnes spéciales, ni ceux arrivés par correspondance. Il les qualifie "d’illégaux"

Constant dans l’effort (et surtout beaucoup plus calculateur que ce que pourrait laisser supposer son impulsivité) il a, au cours des mois passés, anticipé cette situation et préparé le terrain en essayant d’accréditer l’équivalence implicite « vote par correspondance = fraude » tout en incitant ses sympathisants à se déplacer dans les bureaux de vote le jour J.

Il est quand même extrêmement dangereux pour la Démocratie en général que le président d’un puissant État soit le premier à jeter le doute sur le système électoral de son Pays. Durant quatre ans Trump a dressé les catégories de citoyens américains les unes contre les autres et son obstination conduit à ce que presque la moitié des habitants des USA contestent la sincérité et la légalité de l’élection. Cette situation est potentiellement explosive (Cf. billet « Cul (d’) ânon » du 16 octobre.)

Faudra-t-il dans quatre ans mandater des observateurs de l’ONU pour garantir au Peuple américain qu’il n’y a pas de fraudes massives, comme dans certains pays difficilement récemment sortis d’une dictature et notoirement connus pour ces pratiques ? Quel camouflet s’il fallait en arriver là !

Bien entendu la tentation existe de mettre cette situation détestable sur le compte de la relative jeunesse des USA, couplée au manque supposé de culture démocratique du peuple américain, tout en nous gargarisant de notre comportement plus posé et plus sage de vieux Européens.

Ce serait une grave erreur. Des régimes « illibéraux »  plus ou moins avoués se développent sur notre continent  (groupe de Visegrád : Pologne, Hongrie, Slovaquie, Tchéquie) ou à nos portes (Turquie) et nous ne réagissons que mollement.

De même il est courant d’intenter des procès en illégitimité au président de la République, élu finalement par moins de 50% des Français (43,61 % des inscrits) en mai 2017. Le fait que ces basses allégations émanent de candidats ou d’amis de candidats ayant rassemblé beaucoup moins de nos concitoyens sur leurs noms au premier tour (Jean-Luc Mélenchon, 14,84% des inscrits ; Nicolas Dupont-Aignan , 3,56 % des inscrits) rendent celles-ci encore moins légitimes, mais le mal est fait. Sauf à retourner à la source pour se rafraîchir la mémoire, nos  concitoyens peuvent imprimer cette petite musique surtout si elle tourne en boucle sur les pages amies de leurs communautés sur les réseaux sociaux.

Nous ne sommes pas à l’abri d’une "Dérive Trumpienne" dans notre vie démocratique.

Il n’y a qu’un seul domaine où je serai tenté par les règles de comptage de Trump : les matchs internationaux de sports collectifs des équipes de France (football, rugby, handball, volley ball, basket ball,….)

On pourrait adopter les règles suivantes.

Si au coup de sifflet indiquant la mi-temps la France est devant au tableau d’affichage, on déclare le match terminé par anticipation et on acte la magnifique victoire de l’équipe de France.

Si à la mi-temps la France n’est pas en tête, on entame une deuxième mi-temps. Dès que l’équipe de France marque suffisamment pour passer devant, on siffle la fin du match (mort subite ou golden goal) et on acte la magnifique victoire de l’équipe de France.

Si à la fin du temps règlementaire l’équipe de France n’est toujours pas devant au score, l’arbitre déclare le match « illégal » pour fraude et on prévoit de le rejouer à une date ultérieure. Éventuellement une demande de radiation de l’équipe adverse par la fédération internationale du sport concerné est déposée par les avocats de la fédération française ad-hoc.

NB : ce principe de règles  loufoques n’est pas de mon invention. Je me suis  honteusement inspiré du grand Pierre Dac qui a une époque où le XV de France de Rugby se faisait régulièrement rosser dans les matchs du tournois des 5 nations par les équipes britanniques avait proposé des règles nouvelles :

« Dès le coup de sifflet d’envoi, les joueurs britanniques devaient s’allonger au sol et ne plus bouger. Les joueurs français étaient emmenés, ainsi que le ballon, en pousse-pousse jusqu’à la ligne adverse pour aplatir un essai entre les poteaux. Les pourboires des coolies opérant les pousse-pousse étaient payés par la fédération de rugby de l’équipe britannique, etc. »

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