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L'observateur Flinois
15 avril 2021

Gouverner c'est prévoir

Au menu  du conseil municipal de Flines du 13 avril figurait le débat sur la révision du Plan Local d’Urbanisme (PLU), notamment les orientations générales du Projet d’Aménagement et de Développement Durable (PADD)

 Un peu d’histoire pour planter le décor.

La loi "Solidarité et Renouvellement Urbains" (SRU) de décembre 2000 instaura un nouvel outil de planification de l’urbanisme à une échelle supra communale : les Schémas de cohérence territoriale (SCoT) destinés à servir de cadre de référence pour les différentes politiques sectorielles, notamment celles centrées sur les questions d’organisation de l’espace et d’urbanisme, d’habitat, de mobilités, d’aménagement commercial, d’environnement, dont celles de la biodiversité, de l’énergie et du climat.

L’horizon de réflexion d’un SCoT est au minimum de 20 ans.

 Le premier SCoT Grand Douaisis couvrait tout l’arrondissement et fut approuvé le 19 décembre 2007.  Le paysage des intercommunalités évoluant, le 1er janvier 2015 les communautés de communes « Coeur de Pévèle » et « Espace en Pévèle » (région d’Orchies) se retirèrent du SCoT Grand Douaisis : leurs adhésion à la Communauté de Communes de Pévèle-Carembault emportaient leur adhésion au SCOT Lille-Métropole. Le SCoT Grand Douaisis fut nécessairement mis en révision dans la foulée et la nouvelle mouture approuvée le 17 décembre 2019 : elle est exécutoire depuis janvier 2020.

 Les SCoT sont des documents obligatoires qui s’imposent au PLU : ceux-ci doivent être mis en conformité avec eux, par le biais de modifications si les écarts sont minces ou de mise en révision si l’équilibre général du PLU doit être  bouleversé pour intégrer les règles du SCoT.

 Le premier SCoT Grand Douaisis s’applicait au PLU de Flines dès 2008 mais la commune traîna les pieds. N’ayant plus le choix quand l’instructeur des permis de construire menaça de ne plus instruire, elle finit par voter la mise en révision de son PLU le 4 mars 2009. Dans l’esprit du maire de l’époque, c’était une mise en révision tactique car, s’il y a obligation de mettre en révision le PLU, la loi ne comporte pas de délai pour achever celle-ci : il comptait donc jouer la montre… et il le fit.

 Les travaux de révision du PLU de Flines commencèrent effectivement fin 2013 (déjà  presque 4 ans de perdu !)

 Un premier projet de PLU révisé fut soumis à enquête publique à Flines fin 2018 et aurait dû être approuvé par le conseil municipal début 2019. Hélas, la nouvelle version du SCoT Grand Douaisis en révision depuis 2015 devait elle-même être approuvée courant 2019, instaurant une nouvelle obligation de révision des PLU pour mise en conformité : sitôt approuvé le PLU de Flines aurait dû être mis de nouveau en révision.

 Les élus de la commission PLU de Flines se remirent au travail pour revoir la copie. C’est l’objet de leurs travaux qui a été présenté au conseil d’avril 2021. Le nouveau projet devra être soumis à une enquête publique, vraisemblablement au deuxième semestre 2021, ce qui conduira à une potentielle adoption par la municipalité de ce PLU en 2022. Il se sera écoulé 13 ans entre la mise en révision initiale et l’approbation du PLU !

 Pour l’urbanisme, que dit le nouveau ScoT Grand Douaisis ?

 Dans le document d’orientation et d’objectif (DOO), Flines est classée en « Pôle intermédiaire » avec une cible globale de densité de 30 logements par hectare. Nouveauté, le DOO instaure dorénavant des « enveloppes foncières » pour limiter l’artificialisation globale des sols dans la période 2020-2040 : 854,2 ha pour l’ensemble du territoire Grand Douaisis, dont une partie dévolue aux besoins résidentiels et mixtes (petites activités économiques).

Sur la première période 2020-2030, chaque commune pourra utiliser au maximum la moitié de son compte foncier, la deuxième moitié étant libérable après 2030 si le premier quota est totalement engagé.

 Pour Flines, l’enveloppe foncière totale 2020-2040 est de 0,7 ha pour le renouvellement urbain (friches urbaines type couvent, usine Legland,… et « dents creuses ») auxquels s’ajoutent 11,7 ha de nouveaux terrains à bâtir pour un total de 12,4 ha. Pour la période 2020-2030, la moitié est mobilisable soit 6,2 ha. Avec la densité cible de 30 logements par hectare, un maximum  théorique de 186 logements à construire pourrait être autorisé entre 2020 et 2030 soit 19 logement en moyenne par an. Avec un mélange d’immeubles collectifs plus denses et de pavillons individuels, si on augmente la densité à 40 logements à l’hectare, la surface autorisée de 6,2 ha permettrait d’envisager 248 logements.

 Dans les documents du PADD débattus lors du conseil municipal il est annoncé aux points « 5.1 - Participer aux objectifs démographiques du SCoT » et « 5.2 - Intégrer les capacités d’accueil des opérations en cours et encadrer les possibilités de construire dans les « dents creuses » actuelles » l’objectif de construire 248 logements à l’horizon 2030. Il est précisé que les projets en cours et permis de construire accordés totalisent déjà 267 logements (dont 198 logements locatifs sociaux) et qu’il faudrait rajouter 60 logements « casables » dans les dents creuses.

 La mairie se félicite qu’avec ce qui est déjà autorisé ou en projet bien avancé,  les 267 constructions permettent d’ores et déjà d’atteindre les objectifs du SCoT.

 Une autre lecture des chiffres est possible.

 -       Les 248 logements du projet de Flines, compte tenu de l’enveloppe foncière autorisée jusqu’en 2030, sont atteints avec une densité de 40 logements à l’hectare au lieu des 30 préconisés par le SCoT. Dans le DOO du SCoT, cette densité de 40 logements à l’hectare est réservée... uniquement à la ville de Douai. Flines serait-elle en train de changer sa vocation rurale ? Pourquoi pas, mais encore faudrait-il le préciser clairement aux Flinois afin qu’ils donnent leur avis, si ce n’est leur accord.

 -   Les objectifs (gonflés) de 248 logements sont atteints et même dépassés avec ce qui est connu en avril 2021. L’enveloppe foncière mobilisable de la moitié de 12,4 ha  de terrains à bâtir, (soit 6,2 ha) est-elle totalement engagée par ces opérations ? Si non, il faudra l’aval du SCoT pour accorder des permis de construire en plus jusqu’à consommer tout le foncier possible. Si oui, cela signifie qu’il ne sera plus possible d’allouer des permis de construire sur des nouveaux terrains à bâtir jusqu’en 2030.

 -       Sur les 267 logements certains à aujourd’hui, 198 logements locatifs aidés (selon la nouvelle terminologie, ex HLM et ex LLS) sont prévus. Il s’agit des programmes Résidence du bois de Flines (boulevard des Alliés) et Couvent. Ils représentent 74 % des permis de construire accordés. Le contrat de mixité sociale signé en grande pompe fixait à 242 le nombre de logement locatifs aidés à rattraper avant 2025. Il en manque donc encore 44 (242-198=44). Il faut se rappeler que pour la rénovation du couvent la mairesse a écarté le projet Rabot-Dutilleul au profit d’Eiffage. Le projet retoqué créait  25 logements  sociaux de plus qu'Eiffage, plus étalés, dont 20 en béguinage. Si Rabot-Dutilleul avait été retenu, le déficit n’aurait plus été que de 19 LLS (44-25 = 19) ou logements locatifs aidés. Le choix de la municipalité de ne pas respecter la loi SRU pendant 14 ans et le choix incompréhensible du projet le moins intéressant pour le couvent vont continuer à peser sur l’urbanisme Flinois pendant encore des années.

Dernière conséquence : incidemment, la Voix du Nord de dimanche 11 avril  titrait : « Ruée vers le vert, le marché de l’immobilier explose ». On y apprenait que l’appétit des Lillois pour la Pévèle s’était encore renforcé depuis le premier confinement. Auparavant, les Lillois en mal de campagne s’arrêtaient à Coutiches. L’agent immobilier interrogé affirmait que maintenant, « un pavillon trois chambres avec jardin à 300 000 € au Cattelet se vend ». Le marché immobilier  flinois connait un regain de demande ; les errances du passé contraignent durablement la possibilité de bâtir des pavillons neufs et restreignent l'offre ; les critères du SCoT ne prennent pas compte l’inclusion de Flines dans la zone d’attractivité de la Métropole Européenne de Lille, les élus Flinois n’ayant pas dû se battre beaucoup dans ce sens. Résultat : les prix  du  bâti ancien et des terrains à bâtir vont continuer à grimper à Flines. Même pour les logements locatifs aidés, la demande émanant de métropolitains en mal de campagne risque d’augmenter.

Conclusion

Un premier adage dit « Gouverner c’est prévoir » et un autre souligne «  Petite cause, grands effets ».

On ne peut que constater qu’à Flines on vérifie le second : le refus contre-nature d’une municipalité communiste de créer les HLM prévus par la loi (seule commune dans ce cas de Douaisis Agglo) n’en finit pas d’impacter la population et de se répercuter sur les possibilités de bâtir. La cause de cet embarras : ne pas avoir appliqué en son temps le premier adage.

Malheureusement, les derniers avatars d’urbanisme à Flines (cantine scolaire neuve trop petite, choix de l'opérateur au couvent, achat du Café des Sports, friche potentielle SOGEM) laissent dubitatif sur la prise en compte actuelle de cet adage.

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